20 ans après, que reste-t-il de l'accord de Marcoussis?
24 janvier 2023A l'invitation du président français de l'époque, Jacques Chirac, une table ronde des forces politiques ivoiriennes s'est réunie à Linas-Marcoussis, près de Paris, du 15 au 23 janvier 2003. Elle a rassemblé le parti au pouvoir de l'époque, le FPI, les mouvements rebelles et les partis d'opposition, assistés de l'ancien Premier ministre Seydou Diarra et de facilitateurs désignés par l'Onu, l'Union africaine et la Cédéao.
Cette table ronde avait pour but de trouver un règlement pacifique à la crise politico-militaire ouverte en septembre 2002 et de rétablir la confiance entre les belligérants.
Joël N'guessan, le porte-parole du RDR à cette époque, était présent à Marcoussis. Pour lui, cet accord a permis de montrer aux yeux du monde que si les Ivoiriens se parlent, ils peuvent régler leur conflit.
‘'J'ai eu la chance de participer à cet accord de Linas-Marcoussis. Je peux vous dire que le jour où nous avons signé cet accord, nous étions tellement heureux que nous avons chanté l'hymne national'' se souvient Joël N'guessan.
Les points clés
‘'Ces accords prévoyaient huit points essentiels. Notamment le maintien du président Gbagbo au pouvoir, la formation d'un gouvernement de réconciliation nationale représentant tous les partis, dont les rebelles du Nord, un Premier ministre nommé de manière consensuelle, une révision de la Constitution et les critères d'éligibilité du président''.
Jean-Yves Essis Essoh, membre du bureau politique du PDCI-RDA, rappelle ainsi quelques points de cet accord conclus entre les parties en conflit.
Cette mise sur un pied d'égalité des rebelles et du pouvoir légal a posé certains problèmes. C'est pourquoi certains points de cet accord ont été rejetés par une partie de la population. Jean Yves Essis Essoh rappelle aussi que cet accord de Marcoussis n'a pas empêché la crise postélectorale de 2010 qui aurait fait au moins 3.000 morts.
‘'Aujourd'hui, beaucoup de choses se sont déroulées en Côte d'Ivoire. Nous avons eu une véritable guerre civile en 2010-2011 suite à l'élection présidentielle. Et l'actuel président en est à son troisième mandat. Une situation hautement anticonstitutionnelle'' déplore-t-il.
Les limites de l'accord de Marcoussis ont conduit à d'autres réunions à Accra, Lomé, Pretoria et Ouagadougou.
Un accord dont on parle peu
Si pour Joël N'Guessan, 20 ans après c'est l'esprit de ces accords qui reste, Jean Yves Essis Essoh, pour sa part, estime que rien ne reste de Marcoussis.
‘'Aujourd'hui, les Ivoiriens devraient plutôt s'inspirer de ce modèle : chaque fois qu'il y a un problème, on s'assoit autour d'une table, on analyse, on en tire les conséquences, on définit les responsabilités et on décide d'aller de l'avant'' estime le premier quand le second pense que ‘'ces accords ne sont plus d'actualité".
"Qu'est ce qui reste de ces accords ? Aujourd'hui, il ne reste rien de ces accords'' constate Jean Yves Essis Essoh. 20 ans après, les Ivoiriens parlent en effet peu de l'accord de Marcoussis. Pourtant, celui-ci a permis de régler la question d'éligibilité à la présidence de la République, de naturaliser des millions de personnes venues des pays de la sous-région et de résoudre en partie la question foncière. Des sujets qui jusqu'à un passé récent étaient sources de conflits.