Armes, cigarettes, menstruations ... Le Bundesrat allemand s'intéresse aux sujets du quotidien // En Angleterre l'alcoolisme "épidémie nationale"
C'était vendredi 20 septembre à Berlin : la 980ème réunion du Bundesrat. Séance passée un peu dans l'ombre de l'actualité, en raison des manifestations climat dans le monde entier et de la présentation par le gouvernement allemand de ses mesures pour la planète. On a pourtant discuté et débattu de politique du quotidien pendant plus de 5h30 au Bundesrat, l'un des cinq organes constitutionnels de l'Allemagne.
Le Bundesrat, c'est quoi ?
Le Bundesrat réunit des représentants de chaque gouvernement des Länder, les régions allemandes. Ils se retrouvent à Berlin environ 12 fois par an, une fois par mois. Ce n'est pas eux qui font la loi, mais ils peuvent et doivent donner leur avis sur les textes du gouvernement fédéral présentés au Bundestag devant les députés. Un avis important. Ils peuvent aussi s'opposer, voire faire annuler le vote d'une loi dans certains cas bien précis et peuvent directement faire des propositions de loi. Des propositions votées en assemblée et ensuite, si elles sont validées, transmises au Bundestag, où la loi peut être votée par les députés.
L'avantage c'est que ce sont donc des élus régionaux, qui connaissent généralement les problèmes et les besoins de chaque Land et de leurs habitants.
Quelle taxe pour tampons et serviettes hygéniques ?
91 points étaient au programme de la dernière session du Bundesrat. Avec une première proposition très attendue : celle de baisser le taux d'imposition sur les produits hygéniques en période de menstruations féminines. Tampons ou serviettes sont taxés aujourd'hui à 19% lorsque les femmes se les procurent en magasin. Un vrai débat s'est installé en Allemagne sur la question. Des pétitions signées des dizaines de milliers de fois réclament un taux réduit, à 7%.
C'est désormais ce que deux Länders proposent. "Depuis 1968, année où il y a eu quelques changements dans la politique vis-à-vis des femmes en particulier, les produits ont été soumis à une TVA de 19 %. Depuis il n'y a rien eu pour réexaminer cette situation, ni pour réduire la TVA sur ces produits, ni pour les rendre disponibles gratuitement, dans les lieux publics notamment comme les universités, les écoles et d'autres lieux", expliquait ainsi, Benjamin-Immanuel Hoff, ministre en Thuringe et membre du Bundesrat.
Il a réussi à convaincre. La proposition va désormais être renvoyée en commission pour régler les détails. Le texte incluerait en effet aussi des taxes réduites sur certains produits médicaux et il faut encore accorder l'ensemble des mesures.
En attendant, les femmes allemandes s'organisent pour contourner la loi et faire pression. Une entreprise vend depuis peu un "livre tampon". Cela a la forme d'un livre mais c'est une boîte avec des tampons ! Ainsi le produit est soumis à une taxe de 7%, comme les livres.
Contrôle des armes
Les membres du Bundesrat ont aussi validé un certains nombre de propositions qu'ils ont déjà transmises au gouvernement. Ainsi, face aux menaces des extrémistes politiques, mais aussi aux fanatiques religieux, le Bundesrat veut un meilleur contrôle des armes. Cela veut dire une interdiction de port d'arme ou la possibilité de retirer leurs matériels aux personnes sous surveillance de l'Office de protection de la consititution. Une loi en ce sens avait été préparée l'an dernier mais elle n'a pas été jusqu'au bout. Le Bundesrat a donc fait une demande au gouvernement, qui va transmettre aux députés du Bundestag.
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Accessibilité des trains
Autre proposition adoptée et transmise au gouvernement et aux députés : celle de rendre les trains plus accessibles aux personnes handicapées. Les gares devraient avoir des quais d'embarquement moins hauts. Ce qui permettrait notamment aux personnes en fauteuil roulant de prendre plus facilement le train.
Interdiction des sacs en plastique
"Nous devons faire plus ! En Bavière, nous sommes souvent habitués à ne pas réglementer les choses en les interdisant mais en incitant. Mais il faut agir si les choses ne fonctionnent pas de manière volontaire". Ainsi s'exprimait, vendredi, Thorsten Glauber, ministre bavarois, pour convaincre de la nécessité d'interdire les sacs en plastique à usage unique en Allemagne. "Le volontariat n'a pas fonctionné. Nous avons encore deux milliards de sacs en plastique en circulation chaque année. Un sac est utilisé pendant seulement 25 minutes en moyenne", a-t-il encore expliqué.
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La proposition va être travaillée dans le détail avant de repasser devant l'Assemblée et d'être probablement transmise au gouvernement et députés allemands. Le ministère de l'écologie travaillerait aussi déjà sur la question, selon des médias allemands. La dernière session du Bundesrat a d'ailleurs montré à plusieurs reprises l'importance croissante des questions environnementales en Allemagne. On assiste en ce moment à un changement de discours. Les écolos de longue date s'amusent de voir des élus qui ne s'étaient jamais intéréssés au climat s'y mettre devant l'intérêt de l'opinion publique pour le sujet.
Voitures électriques et éoliennes
Le Bundesrat a discuté la semaine dernière de mesures pour faciliter l'installation de prises de recharge pour voitures électriques pour les locataires d'un logement ou encore de mesures pour faciliter les procédures d'installation d'éoliennes et les rendre plus rapides. Les commissions spécialisées vont, là encore, se pencher sur ces questions, avant que le Bundesrat ne valide tout cela définitivement en séance.
Interdiction de fumer
Les membres du Bundesrat ont enfin évoqué une possible future l'interdiction de fumer en voiture, si des enfants sont présents à l'intérieur. Le Bundesrat propose des amendes de 500 à 3000€. Cela permettrait de protéger un million d'enfants selon les estimations. Le projet de loi devait être préparé dès cette semaine.
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L'Angleterre face à l'alcoolisme
Dans la deuxième partie du magazine, Vu d'Allemagne prend le chemin de l'Angleterre. Sur place une étude récente vient de montrer que la lutte contre l’alcoolisme est en perte de vitesse dans cette partie du pays, par rapport aux autres régions. En cause : des coupes budgétaires massives dans les services de désintoxication. Des chercheurs parlent d'une "épidémie nationale" ! Et tout cela au moment même où d’autres études confirment que les Britanniques boivent plus que les habitants des autres pays du monde.
La société civile prend donc les devant. Une association a par exemple choisi de venir en aide aux enfants de personnes alcooliques, souvent traumatisés et qui risquent davantage de tomber dans l'alcool eux aussi. Melissa Chemam a rencontré bénévoles et professionnels.
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