Moscou face aux incursions de drones ukrainiens
1 septembre 2023C’est un peu David contre Goliath : face aux tirs de missile dévastateurs de l’armée russe, l’Ukraine répond depuis des mois par des incursions de drones qui portent de petites charges explosives mais réussissent régulièrement à atteindre la capitale Moscou.
Ce vendredi (01.09), Kiev a même affirmé avoir mené une attaque de drones contre un aéroport en Russie à partir du territoire russe, ce qui serait une première.
Les objectifs de ces opérations sont multiples.
Il y a déjà la portée symbolique de ses frappes, à savoir le message que Kiev veut faire passer à la Russie et au reste du monde.
"Ces attaques ont pour but d'attirer l'attention des médias et d'habituer les habitants de Moscou au prologue de la guerre", note l’expert militaire David Sharp, qui voit la possibilité que ces attaques s’intensifient en nombre.
Il s’agit d’envoyer un signal, celui que la guerre n’est pas loin, qu’elle peut aussi arriver en Russie, confirme une autre experte en relations internationales à la DW.
Paralyser l’espace aérien
Une autre visée est logistique. Les attaques de drones obligent de plus en plus souvent les autorités de Moscou à fermer l'espace aérien autour de la capitale. L’objectif est de paralyser les aéroports.
Et cela commence à fonctionner. Turkmenistan Airlines est la première compagnie aérienne à avoir interrompu ses vols vers Moscou jusqu'à nouvel ordre.
La situation pourrait bien devenir critique si un drone attaquait un aéroport civil à Moscou et endommageait les pistes, les terminaux ou même des avions. Le spécialiste en questions de défense, Sergey Migdal, estime ainsi que "si l'Ukraine parvenait à mettre les aéroports moscovites hors service de manière permanente, ce serait une grande victoire pour l'Ukraine et une défaite pour la Russie, ce qui ferait sans doute réfléchir le gouvernement de Moscou".
Sergey Migdal n’exclut pas que les compagnies aériennes étrangères pourraient éviter Moscou jusqu'à la fin de la guerre.
La défense anti-aérienne de Moscou
Sur le plan de la stratégie militaire, ces drones portent le combat en territoire russe, et sollicitent les systèmes anti-aériens, pendant que l’armée ukrainienne est engagée depuis des mois dans une contre-offensive dans l’est et le sud du pays.
Justement, ces drones qui parviennent jusqu’à Moscou interrogent évidemment sur la capacité de défense aérienne russe.
L'expert militaire ukrainien Mikhaïl Samus explique que celle-ci est axée sur les "cibles traditionnelles", par exemple les missiles balistiques, et moins sur les petits objets volants, qui sont "fabriqués en matériaux composites, suivent des trajectoires complexes et constituent généralement un défi pour tout système de défense aérienne".
Près de 200 attaques depuis janvier
Selon Mikhail Samus, "lors de la reconnaissance, on peut d'abord lancer un drone pour repérer les différentes stations radars. Puis, une fois les failles trouvées, on peut envoyer des drones en profondeur sur le territoire russe, où la couverture des systèmes de défense aérienne est moindre que dans les zones frontalières".
Selon des chiffres compilés par la BBC, plus de 190 attaques d’objets volants sans pilotes ont été rapportées par les médias russes en Russie et en Crimée depuis le début de l’année.
Dans le même temps, il est impossible de savoir combien de drones ukrainiens ont été abattus avant d’atteindre leur cible.