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"Des Centrafricains reconnaissent la présence russe"

Eric Topona26 juillet 2023

Interview avec Sylvie Baïpo-Temon, la ministre centrafricaine des affaires étrangères. Elle aborde plusieurs sujets liés à l'actualité nationale et internationale.

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A le veille du sommet Russie-Afrique qui démarre jeudi (27.07.2023) à  Saint-Pétersbourg, Sylvie Baïpo-Temon, ministre centrafricaine des affaires étrangères parle de la coopération entre la République centrafricaine et la Russie, de la présence des mercenaires russes de Wagner en Centrafrique et du référendum constitutionnel de dimanche (30.07.2023). 

Interview avec Sylvie Baïpo-Temon


 DW: Le deuxième sommet Russie-Afrique aura lieu les 27 et 28 juillet prochain. Qu'est-ce que la RCA, votre pays en attend?

 Ecoutez, les attentes de mon pays par rapport à ce sommet c'est déjà de pouvoir échanger et partager avec la partie russe de la relation de coopération que nos deux pays entretiennent et ont dynamisés depuis quelques années maintenant.
C'est l'occasion de faire un point sur cette coopération et puis d'entrevoir la suite aussi, comment continuer à la dynamiser et continuer à l'étendre dans d'autres domaines.


DW: La République centrafricaine a signé en 2018 un accord de coopération militaire avec la Fédération de Russie. Cinq ans après la signature de cet accord, quel est le bilan que vous pouvez en faire?

Comme toute coopération, il faut qu'elle soit de plus en plus vivante. Nous devons faire des points d'étape sur une première phase, la relation est à ce jour satisfaisante, parce que déjà cette relation continue. Les officiels continuent à se parler et malgré les difficultés que la République centrafricaine continue à voir et les défis qui sont aussi ceux de la Fédération de la Russie, nous maintenons le cap sur notre coopération, mais nous avons davantage besoin de la diversifier parce que, comme vous le savez aujourd'hui, elle est davantage sécuritaire et liée dans un premier temps à l'embargo imposé sur les armes en République centrafricaine et dans le cadre justement du Conseil de sécurité.
C'est comme ça que nous avons bénéficié dans un premier temps de l'appui de la Fédération de la Russie dans le cadre des livraisons d'armes.
Une relation de coopération qui soit cordiale et amicale, comme nous l'avons aujourd'hui.


DW: On a appris que des mercenaires russes de Wagner sont à Bangui depuis quelques jours pour superviser la sécurisation du référendum constitutionnel du 30 juillet prochain. Est-ce que vous confirmez?

Ecoutez, la République centrafricaine a toujours dit qu'elle a travaillé de manière totalement officielle et transparente avec la partie officielle de la Fédération de la Russie. Il n'y a pas eu de contrats ou d'appels à une société militaire privée.

DW:  Mais la Russie a récemment reconnu la présence effective de ces mercenaires russes de Wagner en Afrique, précisément dans votre pays, la RCA.

On parle des Wagner, des Mozart, on peut les appeler comme vous voulez, mais ça existe partout. Les Etats-Unis ont leurs sociétés militaires privées.La France a une société militaire privée. Le Royaume-Uni a aussi son lot de secrets militaires privés.
Donc je pense qu'il faut qu'on fasse preuve d'honnêteté intellectuelle pour reconnaître que c'est un sujet qui ne concerne que les grandes puissances.

DW: Le problème avec les mercenaires russes de Wagner, c'est qu'ils sont accusés de commettre constamment des exactions contre des civils, que ce soit au Mali ou même en République centrafricaine.

La République centrafricaine, en ce qui concerne des exactions et des violations des droits humains, ce n'est pas quelque chose de nouveau.Vous savez qu'au temps de la Seleka, il y avait d'énormes exactions. Ni les Russes, ni les Wagner, ni je ne sais qui étaient en terre centrafricaine.
Mais sur le terrain, il faut aussi interviewer les concernés, la population centrafricaine.


DW:  Oui, mais les populations centrafricaines accusent justement ces mercenaires russes de piller les ressources minières de leur pays.

Est-ce que vous avez eu l'occasion de parler avec la population centrafricaine ou est-ce que c'est ce que vous avez dit que vous répétez?

DW: Oui, on a échangé au téléphone avec certains Centrafricains.

Vous avez parlé avec des Centrafricains, mais vous avez parlé avec combien de Centrafricains? La République centrafricaine est composée de combien de centrafricains? Il y a des populations centrafricaines qui reconnaissent la présence russe.
Vous savez très bien que dans une guerre de toute façon, surtout dans une guerre qui est asymétrique, les dégâts sont énormes.


DW : Et selon nos informations, Sylvie Baïpo-Temon 1 200 000 000 de francs CFA avait été directement sortie du Trésor public pour financer les activités de Wagner par mois. Pour un pays qui dépend essentiellement de l'aide étrangère est-ce que ce n'est pas démesuré?

Ben écoutez, on parle de beaucoup de choses en ce qui concerne la République centrafricaine. Il faudrait plutôt avoir les preuves parce qu'en République centrafricaine, on dit beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses.
Si nous avions la capacité de pouvoir financer ou nous équiper militairement, vous vous doutez bien que nous le ferons pour mettre fin justement à ces agressions répétées.


DW : Parlant d'agression, depuis bientôt deux ans, la Russie agresse l'Ukraine, quelle est la position de la RCA ?

La position de la RCA elle est claire. Nous sommes dans un débat de non à la violence, mais nous sommes aussi dans une position où il faut se dire les vérités.
Nous, nous avons nos propres problèmes. Il faut arrêter ce deux poids, deux mesures.


DW : Madame la ministre, le 30 juillet, dimanche, les Centrafricains sont appelés aux urnes pour se prononcer sur un nouveau projet de Constitution qui leur sera soumis.Est-ce que franchement, ce référendum est opportun?

Je pense qu'il faut arrêter cette politique de fuir les problèmes.Quand il faut savoir les affronter, il faut les affronter.


DW : Le nouveau projet de constitution ne limite pas le nombre de mandats présidentiels.Est-ce que ce n'est pas un recul démocratique?

La démocratie, c'est quoi? C'est de laisser libre expression au peuple. Donc le nouveau projet de constitution laisse totale liberté au peuple de pouvoir choisir et exprimer son choix.


DW :  Autre question, c'est depuis 2013 que la RCA est sous le coup d'embargo sur les armes. Le Conseil de sécurité de l'ONU doit en principe décider de sa levée ou non le 31 juillet. Est-ce que vous gardez espoir? Vous croyez en sa levée?

Si j'ai un message à passer, c'est qu'il ne faut pas que le Conseil de sécurité fasse perdre la confiance que la République centrafricaine a en elle.

DW : Madame le Ministre, Sylvie Baïpo-Temon merci. 

C'est moi qui vous remercie.