Hommage à Emmanuel Kant en Allemagne
22 avril 2024Il vivait à une époque où les prénoms étrangers étaient souvent francisés par les Français, c'est pourquoi vous avez sans doute entendu parler de lui sous le nom d'Emmanuel Kant. En réalité, ce penseur né au XVIIIe siècle, s'appelait Immanuel, avec un "i”.
Ce n'est toutefois pas pour son prénom qu'Emmanuel Kant est entré dans l'Histoire, mais bien en tant que philosophe.
Sa pensée, une morale du devoir, a marqué son époque, celle des Lumières. Et elle continue d'imprégner les générations qui l'ont suivi, jusqu'à aujourd'hui.
C'est pourquoi le gouvernement allemand rendait hommage aujourd'hui, à l'occasion des 300 ans de sa naissance, à l'auteur de "La critique de la raison pure” et de "La Critique de la raison pratique”. Olaf Scholz, le chancelier allemand, en a profité pour dénigrer le droit de citer Emmanuel Kant à Vladimir Poutine. Selon lui, le président russe aurait cité au moins par deux fois le philosophe de langue allemande en détournant sa pensée.
Königsberg, centre immuable de son monde
Emmanuel Kant est né le 22 avril, en 1724. Dans la ville de Königsberg - située dans ce qui s'appelait encore la Prusse orientale, mais qui correspond à la Kaliningrad d'aujourd'hui, une enclave russe entre la Pologne et la Lituanie.
Un lieu qu'Emmanuel Kant est réputé n'avoir jamais quitté de sa vie. Emmanuel Kant sera d'ailleurs durant toute son existence un homme d'habitudes bien réglées - comme avec sa fameuse promenade quotidienne à heure fixe.
Empreint d'un protestantisme rigoureux (le piétisme), Emmanuel Kant s'intéresse tôt aux mathématiques, à la physique de Newton, à la morale.
Le film "Les derniers jours d'Emmanuel Kant", réalisé en 1993 par Philippe Collin :
Une morale du devoir
Sa pensée vise à définir une morale universelle, valable en tout lieu, en tout temps, dans toutes circonstances. Il compte parmi les grandes figures de ce qu'on a appelé les "Lumières”.
Au cœur de sa pensée, il distingue deux sortes d'impératifs moraux. D'abord l'impératif hypothétique, le "si je veux atteindre tel but, alors je dois faire cela”. Mais pour Kant, ce qui fait la valeur morale d'une action, ce ne sont pas les conséquences de cette action, mais son intention.
On doit agir, selon lui, non pas dans l'objectif d'obtenir quelque chose, mais bien en vertu de la morale. Selon Kant, le comportement de l'être humain doit être dicté par sa raison.
On en arrive alors à la deuxième sorte d'impératif défini par Kant : l'impératif catégorique. Il répond à ce principe : "Agis de telle sorte que la maxime de ton action puisse être érigée par ta volonté en une loi universelle".
C'est plus facile à comprendre que ce qu'il y paraît à première vue : cela veut dire que, quand j'agis, je dois me demander si un monde dans lequel tous les individus se comportent comme moi est possible. Si la réponse est oui, alors mon action est conforme à la morale.
Pour faire plus simple : agis pour le bien, mais surtout pour ne pas commettre le mal. Ainsi, l'action ne doit pas considérer l'être humain comme un moyen, mais comme une fin en soi. Une morale selon laquelle l'esclavage, la colonisation et toute autre forme d'exploitation de l'Homme est répréhensible.
Polémique sur les "races" humaines
Nous l'avons dit, Kant vit à cheval entre le XVIIIe et le XIXe siècle (il meurt en 1804). Le concept d'universalité qu'il défend ne l'empêche pas d'avoir des préjugés racistes, notamment vis-à-vis des personnes de peau noire.
Mais sur ce point, il évolue. En 1775, dans son essai "Des différentes races humaines”, il estime toutefois que la couleur de la peau est une simple caractéristique physique, qui n'augure en rien des capacités intellectuelles d'un individu, puisque tous les humains seraient issus d'une même souche. C'est ce qui fait qu'il a été présenté longtemps comme l'un des premiers penseurs des droits humains universels.