Le coup d'Etat en Birmanie condamné dans le monde entier
1 février 2021Ce sont des dizaines de condamnations à travers le monde après le coup d'Etat en Birmanie. Les militaires ont pris le pouvoir de la jeune démocratie d'Asie du Sud-est dans la nuit de dimanche à lundi. L'Etat d'urgence a été déclaré pour un an, et la cheffe du gouvernement et prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi arrêtée. "Ces développements portent un coup dur aux réformes démocratiques en Birmanie", a réagi le secrétaire général de Nations unies, Antonio Guterres. Le conseil de sécurité de l'ONU tiendra d'ailleurs une réunion d'urgence mardi matin sur le sujet.
En attendant, de nombreux pays ont déjà, eux-aussi, condamné le putsch : aux Etats-Unis, en Allemagne ou en Europe, où la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a demandé le rétablissement du gouvernement civil et "la libération immédiate et inconditionnelle de toutes les personnes détenues". "Je condamne fermement la prise de pouvoir militaire au Myanmar. Je demande la libération immédiate de toutes les personnes arrêtées, y compris le président Win Myint et la conseillère d'Etat Aaung San Suu Kyi, et le rétablissement de l'ordre constitutionnel", a tweeté le ministre fédéral des Affaires étrangères allemand, Heiko Maas.
"Il est à craindre que le coup d'État militaire n'aggrave encore la situation déjà dramatique de la minorité musulmane du Rohingya", a aussi réagi le ministre fédéral de la Coopération Gerd Müller. "Environ un million de Rohingyas ont fui le Myanmar pour le Bangladesh, la grande majorité d'entre eux devant se débrouiller dans les conditions les plus difficiles dans les camps."
Le déroulement des élections mis en cause
L'armée a arrêté, tôt dans la matinée, les responsables au pouvoir. Parmi les personnes interpelées : Aaung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix et conseillère d'Etat, le poste de cheffe du gouvernement civil, depuis 2015 et le président Win Myint. Un coup d'Etat dans le calme mais des véhicules blindés étaient ce lundi déployés dans les rues de la capitale Naypyidaw et de la capitale économique Rangoun.
Les accès au Parlement ont aussi été bloqués, alors que celui-ci devait entamer sa première session après les élections de novembre 2020, remportées à la majorité par la Ligue nationale pour la démocratie, le parti d'Aung San Suu Kyi. C'est justement ces élections qui ont posé problème semble-t-il. Depuis plusieurs semaines les chefs militaires affirment avoir recensé des fraudes "énormes".
Un appel d'Aung San Suu Kyi
Après des menaces, ils ont donc renversé de fait la démocratie, plaçant les généraux aux principaux postes de pouvoir, et promettant au passage d'organiser de nouvelles élections "libres et équitables", une fois l'état d'urgence levé. Un scénario qu'Aung San Suu Kyi n'entend pas respecter : elle a laissé un message demandant à la population de "ne pas accepter la prise de pouvoir par l'armée".
Ce lundi ce sont les supporters des militaires qui ont parfois défilé dans les rues des villes de Birmanie. Mais le directeur adjoint de la division Asie de Human rights watch, Phil Robertson, assure qu'il pourrait y avoir d'autres réactions. "La population est très fortement opposée au retour au régime militaire", explique-t-il dans une interview à la DW. "Une des raisons pour lesquelles Aung San Suu Kyi et son parti ont si bien réussi aux dernières élections, c'est qu'ils sont considérés comme un rempart démocratique par rapport au temps de la dictature militaire, dont le pays a souffert pendant plus de 50 ans. Je pense donc qu'il y aura beaucoup d'opposition de la part du peuple birman."
Critiquée à l'internationale pour sa gestion de la crise des musulmans rohingyas, Aung San Suu Kyi reste en effet très populaire dans le pays. Les réactions de ses partisans seront scrutées dans les heures qui viennent. Même si les communications avec la Birmanie sont très compliquées : Internet et les réseaux téléphoniques ont été partiellement coupés.