Les archives de la Stasi ou la mémoire de l'ex-RDA // Les Arabes israéliens, des citoyens désabusés
Jeudi 26 septembre, les députés allemands ont donné leur feu vert à une grande réforme des archives de la Stasi. Elle prévoit entre autres de transférer aux archives fédérales l'ensemble des documents de la police secrète de l'ex-RDA, une étape importante pour l'entretien de la mémoire de 40 ans de dictature.
Depuis 1991, c'est un office fédéral, le BStU, qui est chargé de conserver et de mettre à la disposition des citoyens qui le demandent les documents les concernant.
111 kilomètres d'archives
Et des documents, il y en a ! 111 kilomètres d'étagères remplies de dossiers, 1,7 million de photos et 34.000 enregistrements sonores...
Pendant près de 40 ans, la Stasi a en effet épié les moindres faits et gestes des citoyens est-allemands, enregistré et documenté tout ce qui pouvait servir à faire pression sur la population pour entretenir le régime autoritaire.
"La sécurité d'État de la RDA n'était pas une entité indépendante, elle avait été créé en 1950 par le parti unique SED sur le modèle russe du KGB", explique Elmer Kramer, porte-parole du BStU. "Jusqu’en 1989, elle espionné les citoyens, les a gardés sous contrôle ou mis en prison, et à la fin elle a aussi tiré sur les gens qui passaient la frontière."
Au moment de la révolution pacifique de 1989, la Stasi disposait encore de 90.000 employés et de 180.000 collaborateurs inofficiels, recrutés comme espions pour récolter des informations au sein de la population.
La Chute du Mur de Berlin, le 9 novembre 1989 ne met pas fin aux activités de la Stasi. Il ne s'agit plus, pour les employés de la police secrète, d'espionner les citoyens, mais de détruire les documents compromettants pour le régime.
"On a vu des camions entiers de matériel sortir des locaux hautement sécurisés de la Stasi", raconte Elmer Kramer.
"On a vu d’épais nuages de fumée, de papiers qu’on brûlait et on a aussi eu des informations de l’intérieur de la Stasi selon lesquelles les déchiqueteuses de documents tournaient à plein régime pour détruire les documents et c’est d'ailleurs ce qu’elles ont fait."
La fin de la Stasi
C'en est trop pour une population opprimée à qui la révolution pacifique a donné des ailes. À Erfurt, le comité citoyen fait poser des scellés sur l'antenne régionale de la Stasi en décembre 1989.
Quelques semaines plus tard, à Berlin, une foule déterminée prend d'assaut la centrale du ministère de la Sécurité à Lichtenberg, le soir du 15 janvier 1990, aux cris de "Stasi raus" - "Dehors la Stasi". C'est la fin de la Stasi.
Après la Réunification, une administration est mise en place pour veiller sur la conservation des documents.
Joachim Gauck, qui sera bien plus tard élu président fédéral, en est le premier responsable. Le BStU a, dès sa création, une durée de vie limitée dans le temps.
La réforme qui vient d'être adoptée par le Bundestag vise à pérenniser la conservation des archives. Elle a été engagée par l'actuel dirigeant du BStU, Roland Jahn.
Depuis 1992, les citoyens ont le droit d'accéder à leur dossier personnel dans les archives de la Stasi. Et ce droit unique au monde, il n'est pas question de le supprimer, rassure Elmer Kramer:
"Tout le monde peut demander à consulter son dossier personnel. Tout citoyen de l’ex-RDA - mais aussi d'autres pays - peut déposer une demande s’il pense avoir été dans le viseur de la Stasi. Nous faisons ensuite les recherches dans les 41 millions de fiches dans les archives et s’il y a des documents, on les traite soigneusement pour isoler les informations qui concernent le citoyen et en transmettre une copie au demandeur et tous les passages qui donnent des informations sur d’autres personnes sont rendues anonymes car elles doivent juste concerner la personne sur laquelle les informations ont été collectées."
Le transfert aux archives fédérales est prévu pour 2021. Ainsi, les archives de la Stasi seront ancrées dans le patrimoine mémorial de l'Allemagne.
Un interlocuteur pour les victimes de la dictature
La réforme prévoit également la création d'un poste de délégué pour les victimes de la dictature. Une doléance importante saluée par les associations de victimes du communisme, qui se réjouissent d'avoir à l'avenir un interlocuteur unique.
"Nous voulons que les victimes de la dictature communiste et leurs familles puissent s'adresser à un délégué chargé par le Bundestag de répondre personnellement à leurs demande", explique Dieter Dombrowski, président de l'Union des associations de victimes de la tyrannie communiste, l'UOKG.
L'organisation réclame par ailleurs que "l'accès aux dossiers ne devienne pas plus difficile mais s'améliore, de la demande à la consultation" et souhaite voir "un centre d'archives moderne" mis en place dans chaque région de l'ex-RDA.
"Nous demandons surtout que les 15.000 sacs qui contiennent des documents déchiquetés de la Stasi soient rapidement réparés pour être exploités", ajoute Dieter Dombrowski.
Les députés allemands ont par ailleurs prolongé jusqu'à la fin 2030 le délai autorisé pour vérifier si les fonctionnaires ou les personnalités ayant un mandat public ont à un moment de leur vie travaillé de près ou de loin pour la Stasi. Une initiative également saluée par l'UOKG.
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Les Arabes israéliens désabusés
Deux semaines après les élections législatives israéliennes du 17 septembre, aucune avancée dans les négociations entre le Likoud et Bleu Blanc n’a eu lieu.
Le gouvernement israélien n’est toujours pas formé. Cette fois-ci, les électeurs arabes se sont pourtant mobilisés, avec un taux de participation de 67%, espérant mettre fin au long règne de Benjamin Netanyahou.
Les quatre partis arabes se sont rassemblés pour n’en former qu’un : la Liste Arabe Unifiée, qui a obtenu pas moins de 13 sièges au Parlement israélien.
Et pour la première fois depuis 1992, les partis arabes ont même recommandé un Israélien, le centriste Benny Gantz, au poste de Premier ministre. Une décision historique, même si trois députés arabes se sont désolidarisés du soutien au parti Bleu Blanc.
Les Arabes d’Israël qui représentent 20% de l’électorat, sont des Palestiniens musulmans ou chrétiens restés sur leurs terres après la création de l’Etat en 1948 et qui ont adopté la nationalité israélienne.
Dans le quartier arabe de Jaffa, cité millénaire perchée au sommet d'une colline accolée à la moderne Tel-Aviv, musulmans, juifs et chrétiens se côtoient quotidiennement. Comment les Arabes de Jaffa se sentent-ils aujourd’hui par rapport à la scène politique en formation ?
Ces citoyens israéliens ont-ils l’impression d’avoir les mêmes droits que les ressortissants juifs, dans ce pays qui dérive de plus en plus à droite ? Un reportage d'Hélène Machline à écouter dans Vu d'Allemagne.
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