Mali, Burkina et Guinée au menu du sommet de la Cédéao
9 juillet 2023Le sommet de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) qui aura lieu en Guinée-Bissau sera donc l'occasion de faire le point sur les progrès qui ont été faits (ou pas) par les trois pays suspendus des organes décisionnels de la Cédéao, suite aux coup d'Etats militaires.
Un petit pas au Mali
Le Mali sera sans doute l'un des grands dossiers de la rencontre. Le pays est embourbé dans une guerre contre les djihadistes depuis 2012 et a connu en l'espace de quelques mois deux coups d'Etat : celui du 18 août 2020 qui a renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta, puis celui du 24 mai 2021, qui a permis à l'actuel président de transition, le colonel Assimi Goïta, de prendre les rênes du pouvoir.
Si le pays a réussi à obtenir de la Cédeao la levée des sanctions commerciales et financières , il reste suspendu des organes de l'institution jusqu'au retour à l'ordre constitutionnel.
Les militaires se sont engagés à un retour à l'ordre constitutionnel d'ici 2024. Des élections communales étaient prévues le mois dernier, mais elles n'ont finalement pas été organisées et aucune nouvelle date n'a été donnée.
Le 18 juin dernier, le pays a toutefois organisé un référendum constitutionnel qui s'est soldé par une victoire du "Oui" pour une nouvelle Constitution.
Ce scrutin, présenté comme un premier pas dans le processus de restitution du pouvoir aux civils, a toutefois été émaillé d'incidents et d'irrégularités et entravé dans le nord du pays, où les attaques terroristes persistent.
L'insécurité reste un grand défi au Mali, qui a tout de même décidé de se passer des forces onusiennes. La Minusma doit en effet se retirer d'ici la fin de l'année.
Des blocages au Burkina et en Guinée
L'insécurité, c'est également un défi pour le Burkina Faso. Et là-bas, comme en Guinée, le troisième pays en transition après un coup de force militaire dans la sous-région, le processus pour rendre le pouvoir aux civils semble évoluer à un rythme plutôt lent.
Une évolution plus lente peut s'expliquer par le fait que la transition au Mali a commencé plus tôt, selon l'analyste politique Kabinet Fofana.
Le mois dernier, le Premier ministre burkinabè, Apollinaire Joachimson Kyélem de Tambèla, avait affirmé devant l'Assemblée législative de transition qu'il ne pourrait pas y avoir d'élection "sans sécurité".
Kabinet Fofana rappelle que le pays s'est mis d'accord sur un calendrier avec la Cédeao. Un comité chargé de rédiger le chronogramme de la transition a préconisé la tenue d'élections au plus tard le 1er juillet 2024, alors que la junte en Guinée s'est pour sa part engagé à céder le pouvoir début 2025.
"Au Burkina, un chronogramme a été validé, il y a cependant des atermoiements dans la mise en œuvre. C'est un peu comme la Guinée où les activités ont été condensées dans un chronogramme validé par la Cédeao. Un chronogramme de 24 mois qui arrivera à son terme en 2025. Il y a même un budget en vue des élections mais hormis le débat d'orientation constitutionnelle qui va déboucher sur l'organisation du référendum, il y a une crise profonde", explique-t-il.
Une partie de l'opposition, notamment le FNDC et le RPG arc-en-ciel (l'ancien parti au pouvoir en Guinée), contestent en effet la manière dont est gérée la transition.
Un risque de "glissement"
Dans ce contexte, certains estiment déjà qu'il sera difficile, aussi bien pour la Guinée, le Burkina Faso que le Mali, de respecter leurs différents chronogrammes. Un avis que partage également Kabinet Fofana. Selon lui, "l'éventualité d'un glissement des calendriers dans les trois pays est fort probable. En raison de causes pas tout à fait identiques. Mais tout cela peut être jugulé par la volonté des militaires dans ces trois pays d'aller vite et surtout que ceci soit convenu et que ce soit dans une approche consensuelle".
Une approche qui permettrait à chaque partie de comprendre la nécessité d'un éventuel report des élections. Pas sûr toutefois que la Cédeao apprécie un tel scénario.
Après les prises de pouvoir par des militaires au Mali (en 2020), en Guinée (en 2021) et au Burkina (en 2022), les trois pays ont été suspendus des organes décisionnels de la Cédéao. Par ailleurs, le Mali et la Guinée avaient également été soumis à d'autres sanctions, notamment économiques, désormais en partie levées. Les discussions de ce week-end à la Cédéao seront sans doute attentivement suivies dans les trois pays.