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Le Niger interdit une application sur la santé sexuelle

Mahamadou Abdoulkarim
16 février 2024

Face à la pression des organisations musulmanes, le gouvernement a préféré interdire l’application censée sensibiliser les femmes et les jeunes sur la santé reproductive et la sexualité.

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Un téléphone portable montrant une application sur la santé au Rwanda
Le ministre de la Communication du Niger a ordonné le 14 février la suppression d’une application de sensibilisation à la santé sexuelle et reproductive des femmes, selon un communiqué du ministère. Image/Archives.Image : DW

Afin de participer à l’éducation des jeunes sur la santé sexuelle et reproductive, l’ONG Women Environmental Program (WEP – Niger) a créé une application appelée Yamaro, téléchargeable sur le Play store ou l’Apple store.

L’objectif était de contribuer à la sensibilisation, notamment des jeunes femmes, sur les questions de santé familiale, à travers des informations et conseils sur la sexualité comme les grossesses non désirées, la contraception, l’espacement des naissances et les maladies sexuellement transmissibles.

Le lancement de cette application devait avoir lieu le 14 février 2024. Mais dès l’annonce de ce projet dans la presse, l’ONG a été victime d’attaques sur les réseaux sociaux.

Un projet scandaleux selon ses détracteurs

Ces attaques ont été conduites par des associations religieuses musulmanes et certaines structures féminines de confession musulmane, qui dénoncent le projet, selon elles, « scandaleux » et ont mis en garde contre ce que ces organisations considèrent comme de la « dépravation des mœurs ».

Des attaques qui ont rappelé celles que ces mêmes associations avaient conduites pour empêcher, en 2008, l’adoption du nouveau code de la famille par l’Assemblée nationale.

Un livret de suivi de santé reproductive.
L'application est censée remplacer ce livret que beaucoup n'utilise plus. Les jeunes filles sont confrontées à d'énormes problèmes, comme les avortements clandestins au Niger.Image : DW/K. Gänsler

Les opposants à cette application ont fait pression sur le ministère de la Communication, mais aussi sur celui de l’Education, pour qu’ils interdisent cette application.

Avec succès puisque les responsables de WEP-Niger ont été convoqués au cabinet du ministre de la Communication, des postes et de l’économie numérique, pour recevoir l’ordre de suspendre l’application, au motif qu’elle n’a pas été validée par le gouvernement et la Haute autorité de protection des données à caractère personnel.

Pour les associations de défense des droits de l’Homme, il s’agit là d’un déni du droit à liberté de l’information et une entrave aux droits de l’Homme.

Les autorités ont cédé

Les autorités ont ainsi cédé à la pression et aux menaces des structures religieuses qui jugent cette application contraire aux valeurs culturelles et traditionnelles du Niger, un pays à majorité musulmane, mais laïque au regard de sa loi fondamentale.

Pour une enseignante à la retraite, militante d’une association de défense des droits de la femme et de la scolarisation des jeunes filles, qui a préféré garder l’anonymat, il s’agit là d’une atteinte à la liberté des femmes et un précédent dangereux.

Selon elle, avec l’évolution de la technologie, il existe de toutes manières, pour les jeunes, d’autres plateformes que Yamaro pour s’informer sur la santé sexuelle et reproductive.

Contactée par nos soins, l’ONG Wep-Niger a préféré ne pas commenter cette interdiction.

L’association continue de subir de nombreuses critiques, certains l’accusant même d’être à la solde de puissances extérieures et ONG internationales qui la financeraient pour introduire des concepts comme le mariage pour tous au Niger. Ce que Wep-Niger dément.