RDC: un militaire a tué treize civils dans l'Ituri
24 juillet 2023Les faits se sont déroulés dans le village de Nyakova dans le territoire de Djugu, à environ 65 kilomètres à l'est de Bunia, chef-lieu de la province de l'Ituri. Selon le lieutenant Jules Ngongo, porte-parole de l'armée dans la région, après la tuerie, le soldat a pris la fuite et s'est caché à Tchomia, où il a été retrouvé dimanche soir et "mis à la disposition de la justice pour être jugé". Tchomia se trouve à deux kilomètres de Nyakova. Le soldat sera jugé ce mardi 25 juillet.
Dieudonné Lossadhekana, président de la société civile de l’Ituri, nous explique qu’il a été difficile pour la famille de joindre le père en raison de la mauvaise connexion téléphonique. L’enfanta donc été enterré en l’absence du père. Dieudonné Lossadhekana revient ici sur les faits.
"Parmi les personnes tuées, il a également tué sa belle-mère et deux de ses enfants. Il a mis une balle dans le bras de son épouse. Dans notre pays, les militaires peuvent se retrouver parmi les civils et se promener avec des armes chargées de munitions et se promener avec partout sans pour autant être inquiété et c’est ce que nous déplorons en tant que membre de la société civile."
Quid du recrutement et suivi psychologique au sein des FARDC ?
Pour Jean-Jacques Wondo, analyste des questions sécuritaires et militaires, ce drame pose la problématique du recrutement des militaires.
Il insiste également sur la formation et l’encadrement des soldats une fois qu’ils sont opérationnels.
Jean-Jacques Wondo rappelle qu’il existe une loi portant sur le statut du militaire en RDC qui énonce un certain nombre d’attitudes que le militaire doit avoir. Malheureusement sur le terrain, ces qualités ne sont ni inculquées ni mises en valeur.
Jean-Jacques Wondo déplore également le fait que les aspects psychologiques ne sont pas assez suivis avant même l’intégration dans l’armée.
"La discipline reste un des éléments clés de la formation d’un militaire. En principe au sein de l’armée, par le passé, le militaire avait un bulletin d’évaluation où dans son unité, chaque période il devait être suivi par sa hiérarchie. Malheureusement en RDC on se rend compte que ces éléments ne sont pas vraiment mis en avant. Ces éléments ne sont pas suffisamment enseignés ou appris aux militaires FARDC et ils pensent que le fait de détenir une arme leur donne une supériorité psychologique, physique et morale sur tout le monde", a confié l’analyste à la DW.
Autre pays, même réalité
Felix Mbete est un sociologue tchadien. Il rappelle que ce genre de comportement est observé surtout chez des militaires dont les pays sont en guerre. Il cite pour exemple, le Tchad, la RDC ou encore la RCA.
"Le président Thomas Sankara le disait dans une célèbre citation, un militaire sans formation patriotique est un criminel en puissance. Souvent des individus sont armés mais ils n’ont pas reçu la formation militaire adéquate. Aujourd’hui, la plupart des citoyens au Tchad quand il y a une rébellion, ils rejoignent le mouvement, ils prennent des armes et ils intègrent l’armée, la police, la gendarmerie et ils ont la gâchette facile. Ils ne comprennent pas que l’arme qu’ils ont c’est pour défendre la population."
En janvier 2022, dans la province du Kasaï central, la société civile avait rapporté l’assassinat de Jacqueline Mwankani, une dame enceinte de cinq mois tuée par son époux, un caporal de l’armée. Une autre dame, Anne Marie Buroho, avait elle aussi été tuée durant la même période par son mari, également soldat.