Réactions d'activistes après la mort de Nkurunziza
9 juin 2020Elevé au rang de "guide suprême du patriotisme" en février par l'Assemblée nationale, M. Nkurunziza, qui concentrait jusque-là tous les pouvoirs dans ses mains, devait rester le président du très influent Conseil des sages du parti.
"Le gouvernement de la République du Burundi annonce avec une très grande tristesse aux Burundais et à la Communauté internationale le décès inopiné de son Excellence Pierre Nkurunziza, Président de la République du Burundi, survenu à l'hôpital du Cinquantenaire de Karuzi (centre-est), suite à un arrêt cardiaque", a annoncé mardi la présidence dans un communiqué.
Appel à l'ouverture d'une enquête sur la mort de Nkurunziza
Pour les défenseurs des droits de l'Homme burundais, les autorités burundaises devraient ouvrir une enquête pour statuer sur les causes réelles du décès du président.
"Le coronavirus tue beaucoup de Burundais dans le silence total du Burundi, dans le déni total des autorités burundaises. Nous aimerions que le décès de Nkurunziza soit un moment de sursaut sur cette pandémie grave au Burundi. Nous demandons alors une véritable enquête sur les raisons du décès du président", a affirmé à la DW Pacifique Nininahazwe.
Cet activiste burundais en exil regrette, par ailleurs, que le président Nkurunziza disparaisse "sans avoir comparu devant une juridiction où il aurait dû justifier ce qui s'est passé au cours de son régime de ces 15 ans de régime et spécialement de cette période qui va de 2015 à 2020."
Justice pour les victimes du régime de Pierre Nkurunziza
C'est aussi l'avis de Pierre Claver Mbonimpa. En 2014, le président de l’Association burundaise pour la protection des droits humains avait passé six mois à la prison de Mpimba de Bujumbura pour atteinte à la sûreté de l’État. Avant d’être libéré, le 29 septembre de la même année pour des raisons médicales.
Ces ennuis ne s’arrêtent pas là. Puisque le 3 août 2015, Pierre Claver Mbonimpa, a échappé de justesse à une tentative d’assassinat dans la capitale burundaise. Il aurait souhaité que le président défunt réponde de ses actes avant de passer de vie à trépas.
"J'ai été victime de ce gouvernement, alors si le chef du gouvernement n'est plus, c’est à dire qu’il sera difficile de le poursuivre devant la justice. C'est cela qui me fait mal. On attendait la justice, mais maintenant, ce sera difficile", dit-il.
Il souhaite toutefois que les personnes de l'entourage de Pierre Nkurunziza, qui sont encore aux affaires, puissent être poursuivies devant la justice.
"Je pense à toutes les victimes du régime, pas de Pierre Nkurunziza seulement, mais du régime. Il y a ceux qui sont là qui ont commis des forfaits, qui devaient aussi être poursuivis devant la justice. Ce n'est pas parce Nkurunziza meurt… La responsabilité pénale est individuelle. Alors il y a d’autres qui sont poursuivis. Mais maintenant les charges qui étaient contre Nkurunziza ne sont plus devant la justice", a réagi M. Mbonimpa.
"Pierre Nkurunziza avait semé la terreur"
Marguerite Barankitse, qu’on surnomme Maggy, a fui les violences qui ont suivi la réélection au forceps de Pierre Nkurunziza en 2015. Elle dirige à Kigali la maison Shalom qui accueille des réfugiés Burundais.
"Le pays est libéré parce qu'il avait, quand même, semé la terreur. En tant que chrétienne, j'aurais aimé qu'il ait le temps de se réconcilier avec ses frères et soeurs en exil. Moi-même, j'aurais aimé le voir et qu'on se réconcilie, mais il vient de partir", a témoigné Mme Barankitse.
Ce que prévoit la constitution burundaise
L’article 121 de la Constitution prévoit qu’en cas de décès du chef de l’Etat, lui succède à titre intérimaire le président de l’Assemblée nationale. Il s’agit actuellement de Pascal Nyabenda, un des très proches du président sortant.
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C’est d’ailleurs lui que Pierre Nkurunziza avait proposé comme candidat du CNDD-FDD à la présidentielle du 20 mai dernier. Mais le groupe des généraux qui l’ont aidé à prendre le pouvoir lui avait toutefois préféré le général-major Evariste Ndayishimiye, qui a donc été élu dès le 1er tour.
Le président de l’Assemblée nationale, Pascal Nyabenda, assure l’intérim pour deux mois, jusqu’à la prestation de serment du nouveau président, Evariste Ndayishime.
L’article 104 de la Constitution précise que le mandat du nouveau président "débute le jour de la prestation de serment et prend fin à l’entrée en fonction de son successeur".
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