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Le Tchad met en doute la force mixte contre Boko Haram

Blaise Dariustone
4 novembre 2024

Le Tchad pourrait se retirer de cette force conjointe mise en place par la Commission du Bassin du Lac Tchad il y a trente ans.

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Photo du président tchadien, Mahamat Deby lors de son investiture, le 6 mai 2024, avec des officiers qui saluent derrière lui (archive)
Mahamat Deby avait décrété un deuil national après l'attaque de la semaine dernière, attribuée à Boko Haram dans la région du Lac TchadImage : Mouta/AP/picture alliance

Le Tchad songerait à se retirer de la Force multinationale mixte, une force créée en 1994 par la Commission du bassin du lac Tchad pour combattre Boko Haram et le grand banditisme dans cette zone. Cette décision, si elle est confirmée, ferait suite à la récente attaque djihadiste qui a entrainé la mort d'une quarantaine de soldats tchadiens. N'Djamena met en cause l'inefficacité de cette coalition, alors que certains experts relèvent plutôt des dysfonctionnements du côté du Tchad.

Léthargie sur le terrain

La présidence tchadienne mettrait en avant, pour justifier cette menace, le manque de mutualisation des efforts et la léthargie sur le terrain face à Boko Haram. Les autorités tchadiennes déplorent que depuis une semaine, le président tchadien se retrouverait seul sur le terrain, dans la région du Lac, pour diriger des opérations contre le groupe terroriste, sans assistance de la Force multinationale mixte.

Mais pour le sociologue et enseignant chercheur Agassiz Baroum, par ailleurs consultant au Centre d'études pour le développement et la prévention de l'extrémisme, l'inefficacité des forces armées dans cette localité s'explique par le manque de moyens.

"On pourrait expliquer cela par la négligence même des autorités militaires, estime-t-il au micro de DW Afrique, mais aussi par le manque de matériel militaire. Parce que Boko Haram attaque toujours la nuit et nos forces de défense et de sécurité n'ont pas de matériel  militaire capable de faire face à ces attaques la nuit. Vous n'êtes aussi pas sans ignorer que ces forces sont restées longtemps dans cette localité. Et lorsqu'une troupe dure dans une localité, celle-ci devient moins vigilante et perd son efficacité. Raison pour laquelle on a eu plusieurs morts, dont le commandant du régiment même qui est tombé."

Une lutte collective

Même si le bilan de cette force semble mitigé, sa création a permis d'affaiblir les groupes terroristes dans la zone, déclare l'analyste politique Yamingué Betinbaye, par ailleurs directeur de recherche au Centre de recherche en anthropologie et sciences humaines de l'Université de N'Djamena.

Grandir et réussir dans une zone de conflit

"La lutte contre le terrorisme n'est pas une lutte individuelle, c'est une lutte collective, rappelle le chercheur. Si le Tchad prend le risque de s'individualiser dans la lutte contre le terrorisme, le pays pourrait essuyer davantage de défaites. Parce que le Tchad pourrait se retrouver dans une situation où, pour poursuivre d'éventuels terroristes jusque dans les territoires voisins, ces accords pourraient ne pas lui être accordés par ses voisins. Le Tchad prend beaucoup de risques si d'aventure cette intention de se retirer de la force multinationale mixte se concrétise".

Certains analystes estiment par ailleurs qu'en agitant cette menace, le pouvoir tchadien voudrait souligner son importance sur la scène régionale en matière de sécurité. Le Tchad mettrait ainsi en exergue le risque que l'influence des groupes terroristes s'accroisse si son rôle n'était pas reconnu et appuyé.

Vue arienne de N'Djamena
Blaise Dariustone Correspondant au Tchad pour le programme francophone de la Deutsche Welledw_francais