Prévention, isolement et vaccination : les trois pistes du docteur Mbala pour lutter contre la mpox
Les États-Unis ont promis 50.000 doses, tandis que le Japon a signé, ce 19 août, avec les autorités congolaises pour 3,5 millions de doses, uniquement pour les enfants. Sur place en RDC, les autorités sanitaires restent prudentes et continuent de surveiller de près la situation.
Suivez notre entretien avec le professeur Placide Mbala, chef de département d’épidémiologie et santé globale à l’Institut national de recherche biomédicale (INRB).
Retranscription de l'interview
DW : Professeur Mbala, que pouvez-vous nous dire sur le mode de transmission actuelle de mpox?
Professeur Placide Mbala : Au départ, ce que nous savions du mpox, c’est qu’il y a beaucoup plus de transmission entre le monde animal et l'homme et très peu de transmission secondaire, c'est-à dire de l'homme aux autres humains.
La transmission d’hommes à hommes se fait essentiellement par contact direct avec la personne malade, en touchant les lésions et les autres matériels souillés par le liquide corporel de la personne malade ou encore en manipulant les animaux malades en forêt.
Depuis 2023, on a vu qu'il y avait des cas que nous avons identifiés de transmission sexuelle. D'abord, il y a eu un petit groupe de MSM (Men having sex with men, NDLR) et ensuite, il y a eu des cas de transmission sexuelle que nous avons identifiés dans la partie est de notre pays. Et ce variant ou cette souche que nous avons appelé le clade 1B semble être adapté à une transmission humaine et qui se propage facilement par voie sexuelle. Et c'est cette même souche qui se propage maintenant vers le Nord-Kivu et d’autres pays voisins, dans la partie Est.
DW : La Belgique, le Japon et même les Etats-Unis ont prévu d'envoyer un certain lot de vaccins en République démocratique du Congo. Quand est-ce que les premiers lots vont arriver ? Que prévoyez vous en termes de sensibilisation à la vaccination pour les populations ?
Professeur Placide Mbala : On ne sait pas exactement quand est ce que les vaccins pourront arriver, mais il y a effectivement une volonté de pouvoir fournir ces vaccins pour la République démocratique du Congo. Il y a un plan de vaccination qui existe et c'est un plan qui est dynamique. Au vu de l'évolution de l'épidémie, cela dépendra de la quantité de vaccins qui sera disponible. On pourra également voir quelles sont les provinces et les populations à prioriser.
DW : Et si vous deviez faire des recommandations aujourd'hui aux populations de RDC et hors des frontières de RDC? Quels seraient les trois points principaux sur lesquels vous mettriez l'accent?
Professeur Placide Mbala : Premièrement, nous savons que c'est une maladie qui est zoonotique. Pour ceux qui sont dans les régions forestières, il faudra éviter de manipuler les animaux malades ou les animaux morts en forêt, surtout si on ne sait pas de quoi ils sont morts.
Deuxièmement, l'isolement des personnes qui sont malades pour éviter tout contact direct.
Et troisièmement, c'est essentiellement la vaccination. Parce qu’il faut noter que le mpox et la variole sont deux maladies qui sont causées par des virus de même genre, de même famille. Dans ce genre, il y a ce qu'on appelle l'immunité croisée. Par exemple, pour la variole, on a utilisé la vaccine, qui est également un virus du même genre pour pouvoir immuniser contre la variole. Et cette même vaccine qui immunise contre la variole, immunise également contre le mpox, pratiquement à plus de 85 % à peu près. Donc, les personnes vaccinées contre la variole sont, si je peux dire, pratiquement immunisées également contre le mpox.
DW : Par rapport à ce qui se passe aujourd'hui avec le mpox. Est-ce qu'on pourrait se retrouver dans le même type de scénarios que pendant la Covid 19 , c'est-à dire confiner les populations, fermer les frontières de manière à pouvoir circonscrire la maladie et endiguer la propagation du virus ?
Professeur Placide Mbala : Le virus ne se transmet pas comme la Covid, par l'air. Je ne pense pas que ça pourra aider à contenir l'épidémie. Parce que si jamais il y a par exemple des cas bénins avec des lésions seulement localisées au niveau de la région génitale, comment allez-vous détecter ces cas? Je pense qu'il faut une coordination internationale régionale pour aider à mieux détecter, à mettre en place des moyens de prévention et aussi de moyens de prise en charge adéquats.