L'attentat de Magdebourg, juste avant Noël, a replacé les thèmes de la sécurité et de la migration sur le devant de la scène en Allemagne. Avec eux, d'autres sujets tels que combattre la migration irrégulière, encourager la migration de personnels qualifiés, mieux résister aux cyber-attaques et à celles des ennemis de la démocratie sont les grands défis de politique intérieure qui attendent le gouvernement qui sortira des urnes le 23 février en Allemagne...
Tous ces défis s'inscrivent dans un contexte de crise : celle dans laquelle se trouve l'économie allemande. Des fermetures d'usines, notamment dans le secteur automobile, des emplois en danger et une inflation qui est repartie à la hausse et qui continue de peser sur le porte-monnaie des consommateurs... L'Allemagne n'est pas en grande forme !
"Le plus gros problème que nous avons dans ce pays, c'est que notre économie est à bout de souffle", estime Marco Wanderwitz, du parti conservateur CDU. Il était jusqu’en 2021 chargé du gouvernement pour les Länder de l’Est. Selon lui, l'état de l'économie allemande "touche vraiment aux fondements et aux perspectives d'avenir".
Coût de l'énergie et manque de personnel qualifié
Selon Marco Wanderwitz, les acteurs économiques ont perdu confiance en la politique. Cela est lié aux coûts de l'énergie et des salaires, au mauvais état des infrastructures ou encore à la concurrence de plus en plus ardue de la Chine. Le manque de personnel qualifié et les lourdeurs bureaucratiques sont également cités comme raisons.
Sur ce dernier point, Omid Nouripour, ancien chef du parti des Verts, estime que l'Allemagne paie surtout l'échec de la transition numérique. "Nous avons une double crise, à la fois conjoncturelle et structurelle. On le voit à nos infrastructures, au fait que le fax est toujours un des principaux modes de communication dans certaines administrations. Et on le voit au retard d'investissement dans ce pays."
A cela s'ajoutent des cyber-attaques, quasi-quotidiennes sur les entreprises ou des infrastructures telles que les réseaux électriques. Fin 2024, les dépenses en cybersécurité des entreprises et des administrations ont franchi pour la première fois la barre des 10 milliards d'euros. La protection contre ce genre d'attaques, souvent menées de l'extérieur, constitue donc un grand défi pour l'année qui vient de commencer.
Tour de vis à venir sur la migration
Mais les deux grands sujets qui risquent de donner du fil à retordre au futur gouvernement, ce sont la migration et la place de l'extrême-droite dans la sphère politique. Depuis l'attaque meurtrière sur le marché de Noël de Magdebourg, dans l'est de l'Allemagne, perpétrée le 20 décembre par un réfugié saoudien, le sujet est plus que jamais au cœur des débats.
Pour le polilogue Benjamin Höhne, le contexte actuel est propice au discours anti-immigration. "La tendance est à une droitisation des débats. Une politique migratoire ouverte, qui tente de reconnaître globalement les droits de l'homme, n'est plus à la mode. Des événements aussi catastrophiques que ceux qui se sont produits à Magdebourg ne feront probablement qu'accentuer cette tendance."
Selon le politologue, la question migratoire n'est plus abordée que sous le prisme identitaire et sécuritaire. Et cela alors que l'Allemagne manque cruellement de main d'œuvre qualifiée.
"L'immigration est presque exclusivement discutée sous l'angle des menaces potentielles pour la sécurité du pays, Ce faisant, d'autres facettes du thème de l'immigration sont reléguées au second plan comme le manque de personnel qualifié."
Des chiffres en baisse mais la migration toujours au top des préoccupations...
Alors que la gestion de la migration est citée comme deuxième inquiétude des Allemands après la hausse des prix, l'Allemagne a réintroduit des contrôles à toutes ses frontières en septembre pour limiter les entrées illégales sur son territoire.
Selon les chiffres présentés par la police le 3 janvier, environ 11.500 personnes ont ainsi été refoulées à la frontière. Le nombre des demandes d'asile a également baissé en 2024, tandis que celui des expulsions a augmenté - plus de 18.000 personnes entre janvier et novembre 2024, soit 20% de plus que l'année précédente.
Mais de nombreuses communes continuent de dire qu'elles sont saturées par les demandes d'accueil et de prise en charge et réclament l'aide du gouvernement fédéral. Marco Wanderwitz, l'ancien chargé du gouvernement pour les Länder de l'Est, estime lui que l'immigration est une question gérable.
"D'abord, les chiffres ont baissé. Et je trouve que le sujet est présenté de façon exagérée. Je ne connais que des responsables communaux qui disent que c'est beaucoup moins difficile qu'en 2015. Mais tout le monde continue à hisser le drapeau blanc."
L'AfD toujours en deuxième place dans les sondages
Dans le même temps, la société allemande semble résignée à voir l'extrême-droite mener la danse. Selon un sondage réalisé par l'institut Forsa entre le 2 et le 6 janvier, le parti AfD enregistre encore 19% des intentions de vote, une tendance stable depuis plusieurs semaines.
Désormais, ses dirigeants peuvent parler de "remigration" sans risquer de levée de boucliers. Il y a tout juste un an, une vague d'indignation avait suivi des révélations du collectif de recherche Correctiv au sujet de projets de "remigration" discutés lors d'une réunion secrète à laquelle participaient des membres du parti d'extrême-droite AfD. Des dizaines de milliers d'Allemands avaient manifesté pendant des semaines contre l'extrême-droite.
Des milliers de personnes venues de toute l'Allemagne se sont toutefois donné rendez-vous samedi pour protester contre le congrès de l'AfD près de Leipzig à l'appel du collectif "Widersetzen - S'opposer".
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Le charbon polonais a de beaux jours devant lui
Alors que la Grande-Bretagne a fermé en 2024 sa dernière mine de charbon et que l'Allemagne croit toujours en la sortie du charbon en 2030, la Pologne peine à se débarrasser de cette énergie polluante.
Le pays reste le premier producteur en Europe, avec 3,5 millions de tonnes extraites chaque année. Alors que plus de la moitié de l’énergie consommée par les Polonais provient encore du charbon, l’impact de cette énergie fossile sur la santé des habitants se fait sentir, comme l’a constaté notre correspondant en Pologne Adrien Sarlat.
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