L'Allemagne est-elle prête à limiter la vitesse de ses autoroutes ? // Avec le Refugee Food Festival, la connaissance de l'autre passe par le palais
À la frontière allemande, des panneaux rouge et blancs indiquent la vitesse maximale autorisée dans le pays : 50km/h en ville, 100 km/h sur les routes secondaires. Mais pour l'autoroute, point de limite ! Un panneau rectangulaire bleu indique 130 km/h, mais c'est une simple recommandation pour les automobilistes.
En réalité, les tronçons d'autoroute où il vaut mieux éviter la file de gauche quand on roule raisonnablement ne sont pas si nombreux puisque beaucoup de zones sont à vitesse limitée - environ la moitié du réseau autoroutier.
Un débat idéologique ?
Mais le débat sur une limitation générale de la vitesse est récurrent en Allemagne. Et ça fait plus de 50 ans que ça dure, déplore l'économiste Thomas Puls, spécialiste des transports et de l'infrastructure à l'Institut de l'Economie allemande (IW).
"On en a parlé pour la première fois en 1971 en Allemagne ! Le ministre des Transports de l'époque avait alors proposé une limitation à 100 km/h sur toutes les routes pour renforcer la sécurité routière. On avait à l'époque 20.000 morts par an, aujourd'hui il y en a 80% de moins. De mon point de vue, ce débat n'a plus lieu d'être depuis longtemps, il est devenu purement idéologique."
La Deutsche Umwelthilfe - Aide allemande à l'Environnement, n'a pas l'impression de mener un combat idéologique. L'organisation milite depuis de nombreuses années pour une limitation générale de la vitesse - sur l'autoroute mais aussi sur les routes secondaires et en agglomération.
Comme son nom l'indique, elle met en avant la protection de l'environnement, mais il y a d'autres arguments, explique Dorothee Saar. Elle est responsable des transports et de la qualité de l'air à la Deutsche Umwelthilfe.
"Il n'y a pas seulement la protection du climat qui joue un rôle, mais aussi la sécurité routière et la réduction du bruit. Nous avons aussi toujours mis en avant le fait que les capacités des routes seraient augmentées si on avait une circulation plus fluide. Ce serait une mesure bon marché, avec un effet rapide et qui est en plus approuvée par une majorité d'Allemands, donc nous la soutenons depuis des années et nous n'abandonnerons pas avant qu'elle arrive enfin."
Une majorité d'Allemands pour une limitation à 130 km/h
Différents sondages de ces dernières années confirment la tendance : plus de la moitié des Allemands sont favorables à une limitation de la vitesse à 130 km/h sur l'autoroute.
Cela n'a pourtant pas suffi pour imposer cette mesure au niveau fédéral. Le parti libéral FDP, qui fait partie de la coalition au pouvoir, y est fermement opposé.
Mais avec l'envolée des prix de l'énergie, le sujet est revenu dans l'actualité. En mai, les ministres régionaux de l'Environnement ont appelé pour la première fois à limiter la vitesse pour réduire les dépenses énergétiques. Quelques semaines plus tard, c'est le patron de l'Agence internationale de l'Energie qui invitait les Allemands à rouler moins vite pour économiser du carburant.
Pour soulager le porte-monnaie des automobilistes, le gouvernement a préféré mettre en place une réduction à la pompe : 30 centimes de moins pour l'essence et 15 pour le diesel depuis le 1er juin. Une concession faite par les sociaux-démocrates et les écologistes à leurs partenaires libéraux, mais que critique Dorothée Saar de la Deutsche Umwelthilfe.
"Il y a eu beaucoup de discussions pour voir comment compenser les effets de la hausse des prix de l'énergie. La réduction à la pompe n'est pas vraiment une réduction mais une baisse de la taxe sur l'énergie qui coûte très cher à l'Etat. Une limitation de vitesse serait plus simple: les automobilistes économiseraient davantage d'argent et de carburant qu'avec cette réduction qui n'incite pas à utiliser moins la voiture."
Entre 100 et 130 km/h, une grande différence
En plus de la hausse des prix de l'énergie, l'objectif de neutralité climatique d'ici 2045 alimente également le débat. Selon l'office allemand de l'Environnement, une limitation de la vitesse à 100 km/h ferait économiser entre 5 et 6 millions de tonnes de CO² par an sur les 30 à 40 millions actuellement rejetées dans l'atmosphère par la circulation automobile. La Deutsche Umwelthilfe, qui défendait déjà une limitation à 120 km/h, va désormais plus loin :
"Nous avons refait nos calculs car nous avons vu, après le début de la guerre, que le besoin d'économiser rapidement le plus de carburant possible a augmenté. Donc nous avons recalculé sur la base de 100 km/h sur l'autoroute, 80 sur les routes secondaires et 30 en agglomération. Et on arrive à des économies de 9,2 millions de tonnes de CO² par an. Pour comparer, une simple limitation à 130 km/h sur l'autoroute représenterait une diminution de 2 à 3 millions de tonnes."
Thomas Puls, de l'institut IW, reconnaît qu'une limitation de la vitesse à 100 km/h aurait un impact écologique, mais cela ne suffit pas à le convaincre.
"A partir de 100km/h, la consommation en énergie d'un véhicule augmente de façon exponentielle à cause de la résistance à l'air. Donc logiquement on consomme moins d'énergie si on va plus lentement. Peut-on instaurer cette limite? Oui sans doute, mais l'effet sera moins important que ce qu'on pense. Personnellement je trouve que 100 km/h dans un grand pays comme l'Allemagne, c'est très lent, on peut à peine dépasser les camions."
Les automobilistes allemands déjà raisonnables ?
Selon une étude de l'IW, réalisée à partir de données recueillies sur les autoroutes de l'ouest du pays, 77% des automobilistes roulent déjà à une vitesse inférieure à 130 km/h. Un argument de plus pour Thomas Puls pour ne pas aller plus loin.
Le Club automobile allemand, qui regroupe plus de 21 millions de membres, a de son côté opté pour une neutralité relative dans le débat. L'ADAC a appelé ses membres à réduire leur vitesse pour économiser du carburant et aussi faire un geste pour l'environnement.
L'institut IW mène une nouvelle étude actuellement pour voir si la hausse des prix de l'énergie a conduit les automobilistes à réduire d'eux-mêmes leur vitesse pour économiser du carburant. Les résultats sont prévus pour septembre.
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Bienvenue au Refugee Food Festival !
Vu d'Allemagne, deuxième partie ! Et comme promis on vous emmène en France, à Marseille déguster de bons plats du monde au Refugee Food Festival.
Ce festival a été lancé en 2016, à Paris, à la suite de la crise migratoire de 2015, pour aller à l’encontre des discours misérabilistes sur les réfugiés. Le principe : changer le regard sur leur expérience par la cuisine. Les rencontres se déroulent dans dix villes de France ainsi qu’à Genève tout le mois de juin, grâce à des chefs confirmés, des cuisiniers réfugiés et des citoyens bénévoles.
A Marseille, la ville la plus multiculturelle de France, 14 cuisines ont ouvert leurs portes pour le Refugee Food Festival 2022, qui se tient du 18 au 25 juin. Restaurants, brasseries et boulangeries marseillaises font vivre des expériences culinaires gourmandes avec notamment des pâtisseries syriennes, des pains ukrainiens, de la bière irakienne, un dîner libanais, ou encore un brunch soudanais et un cours de cuisine éthiopienne… Un reportage à Marseille de Mélissa Chemam.
Vu d’Allemagne est un magazine radio hebdomadaire, proposé par Hugo Flotat-Talon et Anne Le Touzé, diffusé le mercredi et le dimanche à 17h30TU, et disponible aussi en podcast. Vous retrouvez tous les numéros dans la médiathèque, à écouter en ligne ou à télécharger en format MP3. Le podcast est également disponible sur certaines plateformes de podcasts.