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Le débat sur l’accueil des Syriens relancé en Allemagne

Marco Wolter | Avec agences
10 décembre 2024

Comme d’autres pays européens, l’Allemagne gèle les procédures de demandes d’asile en cours d’exilés syriens face à "l'incertitude" à Damas.

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Des réfugiés syriens traversent la frontière turque pour retourner en Syrie
Plus de la moitié des Syriens ont fui leur domicile depuis le début du conflit en 2011Image : Dilara Senkaya/REUTERS

L'annonce n'a pas trainé. Aussitôt Bachar al-Assad tombé en Syrie, un jour après les célébrations de la fin du dictateur, l'Allemagne, à l'image d'autres pays européens, a annoncé aussitôt un gel de l'examen des dizaines de milliers de demandes d'asile de ressortissants syriens.

Une décision que Berlin justifie par "l'incertitude” qui règne à Damas. Comme ailleurs en Europe, la migration et le droit d'asile sont devenus depuis longtemps un sujet central pour les partis politiques en Allemagne.

Des dizaines de personnes attendent devant l'enceinte de la prison de Saydnaya pour tenter de retrouver leurs proches
Les familles des disparus en Syrie ne doivent pas céder à leur envie d'essayer de retrouver et exhumer elles-mêmes les corps de leurs proches car cela pourrait empêcher de les identifier, a demandé la Croix-Rouge, qui s'est rendue à la prison de SaydnayaImage : Hussein Malla/AP Photo/picture alliance

Ce thème est d'autant plus central en Allemagne que les élections législatives anticipées se tiennent en février prochain, et que ce scrutin devrait être marqué par une nouvelle poussée de l'extrême-droite. Le parti anti-immigration AfD pourrait signer un score historique et devenir la deuxième force politique.

Les conservateurs, qui réclament également des durcissements de la politique d'asile, sont les grands favoris du scrutin. 

"Expulser massivement"

Une tendance lourde suivie par le gouvernement actuel, qui a fait de l'accélération des renvois de demandeurs d'asile déboutés et du contrôle des frontières intérieures une priorité. "Nous devons enfin expulser massivement", avait déjà affirmé le chancelier Olaf Scholz il y a un peu plus d'un an.

Une vue d'un quartier et d'un carrefour animé de Damas, où la vie reprend son cours
A Damas, des hommes armés en treillis ont remplacé les militaires et les policiers du pouvoir de Bachar al-AssadImage : Mahmoud Hassano/REUTERS

C'est dans ce contexte qu'arrive l'annonce du ministère allemand de l'Intérieur de suspendre les procédures de demandes d'asile pour les exilés de Syrie. 

Selon l'Office allemand pour la migration et les réfugiés (BAMF), plus de 47.000 demandes d'asile en cours sont concernées par le gel de la procédure. En revanche, la nouvelle situation en Syrie n'a actuellement aucun impact sur les décisions prises par le passé.

Un million de Syriens en Allemagne

Pour cette année 2024, la Syrie a, une nouvelle fois, été le principal pays d'origine des demandeurs d'asile en Allemagne, avec 75.000 demandes, devant les ressortissants afghans et turcs.

L'Allemagne accueille en fait la plus importante diaspora syrienne en Europe, avec près d'un million de réfugiés, majoritairement arrivés en 2015 pour fuir la guerre.

Mohammad al-Bachir lors d'une conférence de presse
Mohammad al-Bachir a été nommé à la tête d'un gouvernement de transitionImage : Omar Haj Kadour/AFP/Getty Images

A l'époque, le pays était devenu un modèle d'accueil, avec la décision d'Angela Merkel d'ouvrir les frontières aux demandeurs d'asile syriens, ce qui avait valu à l'ancienne chancelière de devenir personne de l'année pour le Time Magazine

Bien que très discrète depuis son retrait de la vie politique, elle a défendu hier cette décision, en soulignant qu'il s'agissait d'une question de "dignité". Dans le même temps, Angela Merkel a appelé à prendre "au sérieux" le problème de l'immigration clandestine.

Le débat sur le retour des Syriens couve depuis longtemps. Il a été récemment relancé par l'attaque au couteau de Solingen, qui a fait trois morts au mois d'août et dont l'auteur présumé est un demandeur d'asile syrien qui devait être expulsé.

La question est de savoir si la Syrie est un pays sûr, où les personnes expulsées ne risquent pas de répression et de persécution. Pour l'heure, les nouveaux maîtres de Damas, la coalition de rebelles dirigée par Hayat Tahrir Al-Cham, sont un groupe classé "organisation terroriste” par l'Union européenne et les Etats-Unis. L'ensemble des chancelleries occidentales ont appelé le nouveau pouvoir à une transition ordonnée vers un Etat de droit démocratique.

Un artiste syrien peint une fresque d'Angela Merkel sur un mur
"Je crois que la décision que j'ai prise à l'époque d'accueillir les réfugiés était la bonne", a déclaré Angela MerkelImage : Anas Alkharboutli/dpa/picture alliance

Une "prime de départ”

Cet avenir incertain n'empêche pas le conservateur et ancien ministre de la Santé, Jens Spahn, de suggérer d'affréter des avions et d'offrir "une prime de départ de 1.000 euros" aux Syriens désireux de rentrer chez eux.

Il propose également d'organiser une grande conférence internationale pour la "reconstruction et le retour", qui réunirait l'Allemagne, l'Autriche, la Turquie et la Jordanie, soit les pays qui accueillent le plus grand nombre de réfugiés syriens. 

Le chef des libéraux, évincé de la coalition gouvernementale, Christian Lindner, s'est lui aussi prononcé pour une conférence internationale sur la Syrie "qui peut aussi être organisée par l'Allemagne".

De l'autre côté de l'échiquier politique, les socio-démocrates et les Verts tempèrent. Michael Roth, responsable de la politique étrangère du SPD, dit ne pas faire "confiance" aux rebelles qui se montrent certes modérés, mais personne ne sait si cela va durer. Il qualifie les appels à ne plus accueillir de réfugiés syriens de populistes.

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Marco Wolter Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welledw_francais