"Nous adoptons la loi sur l'immigration la plus moderne du monde". Ainsi s'exprimait, en juin dernier, la ministre de l'intérieur allemande, Nancy Faeser, lors des débats au Bundestag sur la "Fachkräfteeinwanderungsgesetz", une nouvelle loi immigration, destinée à faciliter la venue en Allemagne de travailleurs et travailleuses originaires de pays hors de l'Union européenne. Le même jour, le Bundestag, les députés, adoptaient alors cette nouvelle loi sur l'immigration. Le Bundesrat, la deuxième chambre du Parlement vient de le faire aussi et de valider ainsi définitivement cette loi en ce mois de juillet.
Pourquoi cette loi ?
L'Allemagne manque cruellement de main d'oeuvre dans de nombreux secteurs d'activité. "L'institut de recherche sur le marché du travail de Nuremberg comptabilisait fin 2022 près de deux millions de postes non pourvus", rappelait Nancy Faeser au Bundestag en juin dernier. "Le manque de candidats est l'un des plus gros freins à la croissance de notre pays. Il manque des travailleurs partout : dans les soins, dans les hôpitaux avec les médecins, dans les crèches, dans les écoles, dans les métiers spécialisés, chez les artisans et même désormais dans l'administration publique", soulignait la ministre.
L'Allemagne multiplie ainsi les initiatives pour attirer des travailleurs de l'étranger. Ces derniers mois, plusieurs ministres se sont rendus à l'étranger pour attirer de potentiels candidats : au Brésil, au Canada, au Ghana, ou tout récemment en Inde. Dans ce dernier pays, le ministre du Travail et des Affaires sociales, Hubertus Heil, a dit aux clairement à des jeunes lors d'une rencontre que l'Allemagne "avait besoin d'eux".
C'est donc pour ces raisons que la coalition au pouvoir en Allemagne vient de décider et de faire passer cette nouvelle loi, trois ans seulement après une autre loi sur l'immigration.
Que prévoit cette loi ?
Il y plusieurs points importants à retenir :
-D'abord l'attribution de la carte bleue européenne va être facilitée. Cette carte bleue existe depuis 2012 en Europe. Elle permet à des personnes diplômées de l'enseignement supérieur d'immigrer en Europe pour travailler. Mais les critères pour l'obtenir sont stricts : il fallait à une personne candidate jusqu'ici une promesse d'embauche dans le secteur d'activité de son diplôme universitaire avant l'arrivée en Allemagne et avec un salaire minimum, 3796€ par mois, un bon salaire. Ce qui fait qu'aujourd'hui beaucoup de personnes n'arrivent pas à obtenir la carte, soit parce qu'il est difficile de trouver un emploi en Allemagne depuis l'étranger, soit parce que les salaires proposés sont trop bas.
Avec cette nouvelle loi il sera désormais possible d'obtenir la carte en trouvant un emploi dans un autre métier que celui pour lequel la personne s'est formée à l'université, et le niveau de salaire minimum sera baissé.
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-Un autre changement très important, mis en avant récemment aussi par la ministre de l'intérieur Nancy Faeser, c'est la mise en place d'une "carte opportunité". Le système existe déjà dans d'autres pays, comme le Canada. Il met en place un système de points pour obtenir le droit de venir, indépendamment du fait que le diplôme obtenu par la personne dans son pays d'origine soit reconnu en Allemagne.
Pour prétendre à cette carte, il faudra avoir un niveau minimum en allemand -un niveau A1, les bases de la langue- et avoir suivi une formation d'au moins deux ans dans son pays d'origine. Des points seront attribués ensuite en fonction d'un niveau d'allemand plus élevé, des diplômes obtenus dans son pays d'origine, des années d'expérience professionnelles ou encore du niveau d'anglais. Une personne qui arrive à six points et peut subvenir d'elle-même à ses besoin en Allemagne obtiendra alors cette "Chancenkarte", lui permettant de venir un an dans la République fédérale pour trouver un emploi.
-Cette nouvelle loi doit permettre aussi un regroupement familial plus important. Les parents et beaux-parents des personnes concernées pourront plus facilement venir s'installer en Allemagne. Jusqu'ici seul(e)s les partenaires et les enfants pouvaient rejoindre un travailleur ou une travailleuse.
-Enfin il faut noter que les demandeurs d'asile arrivés en Allemagne avant le 29 mars 2023 pourront rester aussi, quelque-soit l'issue de leur demande d'asile, à condition qu'ils trouvent une formation ou un emploi. La mesure a été très critiquée par la droite et l'extrême-droite. "Si on examine la loi et les modifications de l'ordonnance sur l'emploi, on remarque qu'il est certes question d'immigration de main-d'œuvre qualifiée. Mais il s'agit avant tout de l'immigration de personnes peu qualifiées du monde entier et d'un nouveau droit de séjour pour les personnes en instance de départ", regrettait par exemple la députée conservateur CDU/CSU Andrea Lindholz récemment au Parlement pendant le vote de la loi.
Quelles suites ?
Les responsables de l'agence pour l'emploi ou des chambres de commerce ont salué le texte. A l'extrême-gauche on critique une loi instaurant "une politique migratoire à deux vitesses", où les moins qualifiés ne pourront venir en Allemagne. Et beaucoup, de tous côtés, mettent déjà en garde : il faudra veiller à la bonne mise en place du texte, à ne pas multiplier les procédures administratives, qui pourraient freiner l'immigration. D'autres s'inquiètent du manque de logements dans de nombreuses villes du pays, qui pourrait aussi freiner les arrivées.
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Difficile cohabitation avec les coyotes au Canada
Après la rocambolesque chasse à la lionne à Berlin, qui s'est avérée être un sanglier, le grand reportage de Vu d'Allemagne prend la route du Canada.
Dans ce pays les coyotes posent problème dans plusieurs villes. Ces animaux sauvages proches du loup sont de plus en plus nombreux. C'est le cas par exemple à Vancouver. D'après la Société de protection des animaux de Colombie-Britannique, ils seraient, là-bas entre 2000 et 3000 dans la région métropolitaine. Alors ce n'est pas nouveau, à Montréal le coyote a colonisé la ville dès les années 70. Mais les animaux sont de plus en plus nombreux et aujourd'hui des habitants dénoncent des comportements agressifs. La question de la cohabitation avec l'animal est posée... Récit et reportage d'Alexis Gacon sur place à écouter en seconde partie de ce magazine.