Rapport accablant et démission dans l'Eglise allemande
19 mars 2021Cela n'est une surprise pour personne. On soupçonnait depuis longtemps des abus sexuels en série dans le plus grand diocèse d'Allemagne, celui de Cologne. Mais les chiffres publiés ce jeudi dans un rapport de plus de 800 pages font froid dans le dos : trois cent quatorze mineurs, en majorité des garçons de moins de 14 ans, ont été abusés sexuellement entre 1975 et 2018.
Deux cent deux personnes, membres du clergé et laïcs aussi - qui sont représentés dans le diocèse en Allemagne - sont mis en cause. "Nous nous sommes heurtés à un système caractérisé par un manque de compétence, un manque de clarté juridique, un manque de possibilités de contrôle et un manque de transparence qui favorisait dans tous les cas le secret et dans lequel de nombreux protagonistes, également extérieurs à l'archevêché, étaient impliqués", a expliqué jeudi Björn Gercke, un des avocats auteurs du rapport.
Ainsi, de nombreux responsables cléricaux savaient et n'ont rien fait dans de nombreux cas. Le rapport estime que 70% des auteurs étaient des membres du clergé, qui n'ont pas été sanctionnés.
Un premier rapport l'an dernier
L'an dernier déjà l'affaire avait fait grand bruit. L'archevêque de Cologne, Rainer Maria Woelki, avait commandé un premier rapport à des avocats sur ces affaires. Puis refusé de le rendre public. Aujourd'hui, il confesse des erreurs au sein de l'Eglise mais Rainer Maria Woelki insiste aussi sur des cas dont les auteurs ont déjà été sanctionnés.
"Les manquements graves au devoir ne se sont en fait produits que dans les cas où les clercs étaient les auteurs, mais pas avec les laïcs. Dans ces cas, des mesures décisives ont apparemment toujours été prises rapidement et de manière cohérente", a-t-il assuré ce jeudi pendant la présentation du rapport.
L'archevêque de Hambourg démissionne
Rainer Maria Woelki a tout de même dit ses regrets : "Je dois dire que je suis profondément touché et que j'ai honte de tout cela. Car je suis convaincu que les faits doivent aussi avoir des conséquences pour les membres du clergé." En réaction au rapport deux membres du diocèse de Cologne ont été démis de leurs fonctions.
L'Archevêque de Hambourg, Stefan Hesse, en poste auparavant à Cologne et mis en cause également, a lui présenté sa démission au pape. Mais l'actuel archevêque de Cologne, Rainer Maria Woelki, a été mis hors de cause par le rapport. Et un des principaux accusés, le cardinal Joachim Meisner, ancien archevêque de Cologne, est décédé en 2017. De quoi provoquer la colère des victimes.
"Ce rapport est pratique pour l'Eglise !", s'énèrve Matthias Katsch, cofondateur d'Eckiger Tisch, une association de victimes de violences sexuelles, notamment au sein de l'Eglise catholique "On dit que Meisner est responsable de tout, et il est déjà mort. Ce que les avocats auteurs du rapport annoncent, c'est un acquittement. Je regrette que le cardinal Woelki de Cologne ne voie pas que sa responsabilité, également sa responsabilité morale, va au-delà des limites de ce que les avocats peuvent attester."
Sorties de l'Eglise en cascade
Si le cardinal de Cologne est lavé de tous soupçons par ce rapport, il n'en a pas fini avec les critiques et les problèmes. Depuis les premières révélations de violences sexuelles en Allemagne il y a une dizaine d'année, l'Eglise a perdu deux millions de membres. Le nombre de personnes se faisant débaptiser pour officiellement ne plus appartenir à l'Eglise explose encore depuis des semaines à Cologne et ailleurs dans le pays.
En 2018, un autre rapport commandé par l'Eglise allemande avait dévoilé que 3.677 enfants ou adolescents avaient été abusés sexuellement depuis 1946 par plus d'un millier de membres du clergé. La plupart n'avaient pas été sanctionnés.