Côte d'Ivoire : trop cher, le cacao ne se vend plus bien
1 mars 2021Depuis la campagne 2020-2021, la Côte d’Ivoire et le Ghana appliquent un Différentiel de Revenu Décent (DRD) de 400 $ sur chaque tonne de fèves vendue, afin de mieux rémunérer leurs planteurs.
Avec ce Différentiel, le cacao ivoirien serait devenu trop cher. Les concessions sur les prix, obtenues par la Côte d'Ivoire et le Ghana, en 2020, auprès des chocolatiers, se retournent ainsi contre les producteurs. Le cacao ivoirien ne trouve plus acquéreur.
Une crise dont les premières victimes sont les producteurs et les salariés qui se retrouvent au chômage.
A Abengourou, dans l’est du pays, la situation est devenue désespérée.
Des emplois menacés
Ici, le secteur du cacao est quasiment le seul pourvoyeur d’emplois. Mais, la chute des ventes de cacao depuis le mois de décembre, avec des entrepôts remplis de fèves qui pourrissent, a plongé la région dans la crise et des centaines de salariés des coopératives au chômage technique.
C’est le cas d’Oudé Coulibaly, machiniste dans une coopérative d’Abengourou. "Je suis au chômage technique depuis fin décembre. Ça ne va pas. Je ne sais pas comment faire pour le moment. Donc je suis à la maison parce qu’il n’y a pas de travail. J’ai le loyer à payer et les factures. A l’heure actuelle, c’est difficile pour moi de faire face à mes charges’’, se lamente le machiniste.
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Les multinationales accusées
Dans les rues d’Abengourou, la situation est si grave que les camions chargés de cacao sont immobilisés.
Germain Boa vivait jusque-là de petits boulots et il se retrouve aussi sans-emploi.
"Je ne fais rien. Bon, c’est la débrouillardise comme on le dit dans le jargon. On fait de petits boulots pour juste deux ou trois jours de contrat. On vit comme ça quoi, C’est vraiment difficile", dit le jeune homme.
Les travailleurs qui ont la chance d’avoir encore un emploi ne perçoivent plus leurs salaires régulièrement et ils craignent pour leur avenir. C'est le cas de Solange N’gatta, comptable dans une société coopérative de cacao. "Depuis le début de la crise du cacao, c’est difficile pour notre employeur de nous payer régulièrement nos salaires. Et il y a une partie du personnel qui est au chômage technique. Les salaires, lorsqu’ils sont versés, ne le sont pas entièrement. Ce n’est pas fait pour nous arranger. Il y a des pères et des mères de famille, il y en a d’autres qui s’occupent de leurs petits frères qui vont encore à l’école. Donc c’est un peu difficile’’, nous explique la jeune dame.
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Pour sortir de cette crise, les négociants de cacao de Côte d'Ivoire veulent mettre fin au monopole des six multinationales du chocolat. Ils ont exigé, dans un appel lancé début février, une plus grande part des contrats de commercialisation.
Ces six multinationales sont les Suisses Barry Callebaut et Ecom, les Français Sucden et Touton, l’Américain Cargill et le groupe de Singapour Olam.
La Côte d'Ivoire est le premier producteur mondial de cacao avec une production d'environ 2 millions de tonnes par an, dont elle ne transforme que moins de 500.000 tonnes.