RCA : les chances des candidats à la présidentielle
27 décembre 2020Ils étaient au départ 17 candidats à briguer la magistrature suprême. Mais dans ce contexte sécuritaire inquiétant, Jean-Serge Bokassa, fils de l'ancien président Jean-Bedel Bokassa a retiré sa candidature, le mardi 22 décembre. Ils ne reste plus que 16 candidats en compétition dont le président sortant, Faustin-Archange Touadéra, l’ancienne présidente de la transition, Catherine Samba-Panza, Abdoul Karim Meckassoua, l’ancien ministre des Affaires étrangères et directeur de cabinet de l'ex-président François Bozizé, ou encore les anciens Premier ministre, Martin Ziguélé et Anicet-Georges Dologuélé. Celui-ci avait été battu au second tour de la présidentielle de 2016 par celui qui n’était à cette époque-là, qu’un outsider, Faustin-Archange Touadéra.
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"Le président Touadéra sort avec un bilan. Et en tant qu’observateur, on peut quand même dire que, en 5 ans, malgré un pays complètement dévasté, il y a des choses intéressantes qui ont été faites. Mais, à côté du président Touadéra, nous avons aussi des poids lourds de la politique centrafricaine qui ont leur mot à dire. Vous avez Anicet-Georges Dologuélé. Martin Ziguélé. Et il ne faut pas oublier, Catherine Samba-Panza, analyse Kag Sanoussi, directeur de l'Institut international de gestion de conflit basé à Lille en France.
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Surprise ?
En 2015, l’actuel président, Faustin-Archange Touadéra considéré comme un outsider avait réussi à créer la surprise. Peut-on s’attendre à un tel scénario cette année ?
"Oui, tout est possible", répondent en chœur, ses partisans qui espèrent même la réélection de leur champion dès le premier tour. Un optimisme balayé d'un revers de main par plupart des candidats de l'opposition qui espèrent que le président sortant sera sanctionné dans les urnes. Un espoir qui est douché par les soupçons de nombreuses irrégularités dans l’organisation de ce scrutin par l’Autorité nationale des élections (ANE), accusée d’être inféodée au régime en place.
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Incohérence de l'opposition
D'autres analystes critiquent aussi l’incohérence des candidats de l’opposition, qui pourraient profiter au candidat-président, Faustin-Archange Touadéra. C'est le cas de Thierry Vircoulon, coordonnateur de l'Observatoire de l'Afrique australe et centrale de l'Institut français des relations internationales (IFRI).
"D'une part, ils ont peu de chance. Et d'autre part, ils n'ont pas réussi à avoir une position vraiment commune. Et notamment, ils ont eu beaucoup de mal à se positionner dans ce qui s'est passé la semaine dernière entre le président qui veut à tout prix des élections, quelles que soient les conditions, et puis, les groupes armés qui, eux, voulaient repousser les élections. C'est pour ça d'ailleurs qu'il force cette élection et qu'il a insisté autant pour que l'élection se tienne, même si aucune des conditions n'est réunie. C'est parce qu'il se sent en position de force", soutient le chercheur.
Alliance avec Bozizé
Des observateurs de la vie politique centrafricaine croient qu'Anicet-Georges Dologuélé, le candidat de l'Union pour le Renouveau Centrafricain (URCA) pourrait tirer profit de son alliance avec l'ancien président, François Bozizé et de son parti, La Convergence nationale - Kwa Na Kwa (en langue sango Kwa Na Kwa : "le travail rien que le travail").
Sur le papier, le candidat Anicet-Georges Dologuélé, arrivé en tête lors de la présidentielle du 30 décembre 2015 avec 23,78 % des voix, pourrait bénéficier du report des voix des partisans de François Bozizé. L'ancien président demeure populaire dans son fief de l'Ouham, dans l'ouest du pays, l'une des régions les plus peuplées de la RCA. Problème, les élections n'ont pas pu se tenir dans cette partie du territoire national.
"Malheureusement, j’ai l’impression que plus de la moitié du pays n’a pas voté, c’est ce que nous craignions quand nous avions demandé à ce que les conditions soient requises pour que chaque citoyen puisse exercer son droit de vote, j’ai l’impression que beaucoup ont été privés du droit de vote et c’est dommage", avait déclaré ce dimanche (27.12), au micro de la DW, Anicet-Georges Dologuélé. Et l'opposant d'ajouter, un brin optimiste : "Je pense que la consigne de vote qui a été donnée par le président Bozizé est suivie par ses militants et ses électeurs partout dans le pays, c’était le but du jeu."
Conclusion de Jean-François Akandji-Kombé, Professeur de droit public à l'Ecole de droit de la Sorbonne (Paris, France) :
"Le président qui sera élu pourrait souffrir d’un déficit de légitimité, puisque la majorité des Centrafricains n'auront pas pu s'exprimer dans les urnes."